L'enfant que j'étais dessinait plutôt bien. C'est du moins ce que disait mon entourage (mais l'entourage est-il bien objectif dans ce genre de situation ?). À vrai dire je garde surtout le mauvais souvenir de certains cours, vers la fin du primaire et au collège, où mes tentatives de mélanges de couleurs aboutissaient assez invariablement à des camaïeux caca d'oie, me laissant désemparée. Quant à manier le pinceau…
Bien plus tard, j'avais répondu à une petite annonce, publiée dans
Libé, proposant des cours de peinture. Passée par un ancien décorateur au
TNP de Jean Vilar, ce monsieur déjà âgé à l'époque m'avait dit, plutôt désolé, que comme j'étais gauchère il ne pourrait m'enseigner ce savoir-faire
(je ne suis plus trop sûre mais je crois que ç'avait à voir avec la façon de positionner sa main et de tenir son pinceau). Nous nous étions revus quelques fois avant de nous perdre de vue – ma faute, ma très grande faute, j'avais égaré ses coordonnées, changé de boulot, déménagé… Il faut croire que j'ai de la suite dans les idées.
Judith et Holopherne, détail, Gustav Klimt, huile sur toile, placage or,
palais du Belvédère, Vienne, à la Pinacothèque jusqu'au 21 juin.
Klimt a employé des feuilles d'or pour le fond de ce tableau,
je me suis contentée d'acrylique (étonnant, non ?) et d'encre de Chine…
Voyant mes
lits défaits le prof a prononcé le nom de Bonnard. Il l'a répété devant mes
variations, m'encourageant chaque fois à me lancer. C'était un peu effrayant, un peu vertigineux, tant je ne pensais pas avoir les bonnes couleurs ni même parvenir à les obtenir, mais j'ai fini par me jeter à l'eau.
Nu dans un intérieur, détail, Pierre Bonnard, huile sur toile,
National Gallery of Art of Washington, à Orsay jusqu'au 19 juillet.
Gouache. Ceci – pas plus que mes autres essais – n'est pas de l'art.
Mais je m'amuse bien !
Les teintes des reproductions, sur papier comme en ligne, varient selon les tirages ou les résolutions. Celle qui m'a servi de support pour ce Nu comportait des nuances violacées, qui apparaissent en bleu dans le modèle au-dessus.
La Fenêtre ouverte, Pierre Bonnard, huile sur toile,
collection Phillips, Washington, également à Orsay en ce moment.
Gouache. Là aussi les nuances varient selon les reproductions que l'on trouve.
Si Marthe,
femme et muse de Pierre Bonnard, est très présente dans ses peintures on ne distingue jamais clairement son visage. L'exposition qui se déroule actuellement à Orsay montre des photos prises par le peintre où elle est également très présente mais où on ne voit pas plus ses traits…
L'Heldenplatz avec des lilas, Carl Moll, huile sur toile, palais du Belvédère, Vienne, également à la Pinacothèque jusque fin juin.
Coup de cœur devant les tableaux du monsieur, déception en découvrant un sympathisant nazi. On est certes en Autriche mais il aurait pu être de ceux qui ont fui le pays ou même résisté. C'est sur cette même Heldenplatz (place des Héros) qu'un peu plus de trente ans après que Moll ait achevé ce tableau Hitler proclamera l'Anschluss devant une foule enthousiaste.
Gouache. Le lilas m'inspirerait-il ?
Jusqu'ici j'ai surtout peint le soir, à la lueur tamisée de la lampe du séjour. Je ne vois le résultat de mes peinturlures que le lendemain, et mes maladresses me sont encore plus flagrantes une fois mises en ligne. Un peu comme avec les textes qui me sont confiés : leur lecture n'est pas la même selon qu'elle s'effectue à l'écran ou sur papier, d'où l'utilité de le faire sur les deux supports.