dimanche 15 mai 2016

Non à la précarité des correcteurs dans l'édition

Véritables précaires, déjà victimes des contrats « zéro heure » anglais, nous, correcteurs de l'édition, demandons une amélioration de nos conditions de travail.

Les fameux contrats anglais « zéro heure » existent depuis longtemps déjà en France.

Mais où donc ?

Dans les maisons d’édition.

Dans les maisons d’édition ? Fleuron de la culture française, des Lumières, e tutti quanti… ?

Hélas, oui.

Voici comment travaillent et vivent les correcteurs, préparateurs de copie, lecteurs.

Cet expert du texte, qu’on appellera correcteur pour simplifier, est dit multi-employeurs car il est censé travailler pour plusieurs maisons d’édition ; « censé » car, le travail salarié se faisant de plus en plus rare, 90 % des correcteurs ne travaillent que pour un seul employeur.

Un correcteur est travailleur à domicile (TAD) ; il peut être embauché en CDD.

Jusque-là tout va bien.

La plupart du temps, sans avoir signé de contrat, s’il travaille régulièrement pour une maison d’édition, le correcteur est en CDI de fait, mais sans aucune garantie d’un nombre d’heures travaillé, et aucun revenu fixe et prévisible, l’annexe IV de la Convention nationale de l’édition qui régit le statut des TAD n’imposant aucune obligation aux employeurs d’un salaire mensuel minimum. Il doit se tenir en permanence à disposition de l’entreprise, qui l'emploiera une heure, quinze heures, cent vingt heures ou pas du tout dans le mois. Il est payé à la tâche, au nombre de signes, à un salaire horaire trop bas, et parfois dans des délais qui ignorent que certains jours sont chômés. Si un manuscrit est en retard ou annulé, le correcteur n’a aucune compensation, il se retrouve avec un compte en banque dans le rouge et ses yeux pour pleurer.

Étant en CDI, et bien que cotisant, il n’a pas droit aux allocations chômage.

C’est un intermittent… sans le statut de l’intermittence !

Pour résumer, le correcteur est le rêve du libéralisme absolu : il dépend de l’offre… et se rue sur elle, quand elle se présente à lui.

Mais le libéralisme absolu a trouvé encore mieux.

Encore mieux ?

Est-ce possible ?

Eh oui, l’autoentrepreneur, ou le salarié déguisé, auquel les maisons font de plus en plus appel, car ce dernier coûte encore moins cher. L’entreprise n’a plus de charges à payer.

En mars, une intersyndicale a proposé aux employeurs des améliorations à l’annexe IV. La principale : avoir l’espoir de pouvoir travailler le même nombre d’heures que l’année précédente. Et la possibilité de lisser les revenus annuels de manière à avoir un salaire mensuel fixe…

La réponse est prévue fin juin. Déjà les employeurs ont fait comprendre que « ce statut devait rester attractif pour les employeurs et… pour les salariés ».

Nous demandons que ces améliorations soient adoptées et refusons d’indexer notre attractivité sur notre pauvreté !

Amis lecteurs, ennemis de la précarité, signez cette pétition.

7 commentaires:

Carole a dit…

Et bien, je ne connaissais pas ces conditions.
Je vais voie la pétition.
Bises.

DoMi a dit…

C'est malheureusement peu connu des gens…
Bon dimanche ensoleillé !

Roger Gauthier a dit…

Cela ressemble fort à un travailleur autonome de par chez nous. Ici nous appellerons les employeurs des « clients ». Peu importe le terme, cela revient au même à mon avis.

Le cas de H. est un bon exemple. S'il n'y avait pas eu un important revenu principal dans la maison, pendant longtemps les choses se seraient très mal déroulées, parfois pas du tout. Et ce n'est que tardivement que les choses se sont nettement améliorées et sont devenues très rentables.

Mais la traduction n'est pas du tout la correction linguistique. S'il y a ici beaucoup d'espace pour les traducteurs, noblesse oblige, je soupçonne fort qu'il n'y en a guère plus ici que chez vous pour les gens qui pratiquent cet art qui est le tien. Car finalement, la langue française est un art qui n'est pas donné à tout le monde.

DoMi a dit…

La situation est à la fois comparable et pas comparable : comparable parce que le traducteur ne sait pas quand arrivera son prochain boulot, et pas comparable car ta blonde émet des factures, elle exerce donc en libéral (chez nous aussi, les traducteurs exercent en libéral. Il émettent des factures ou sont payés en droits d'auteurs – ils cotisent donc auprès d'autres caisses – et sont également en grande précarité), mais les correcteurs sont salariés (pas auteurs), ou en tout cas doivent l'être même si certains éditeurs ont tenté de contourner la loi.
Belle journée à toi.

Isa LISE a dit…

Bonjour DoMi, je viens de signer.
Mieux vaut être distributeur dans une grande chaine de supermarché si on veut travailler au contact des livres...
Le métier d'auteur est également précaire... on peut travailler des mois pour n'avoir aucun contrat ou bien être édité pour très peu vendre ou encore voir ses livres échangés et se dire "super je suis lu(e), dommage je ne vais encore pas être payé(e)"...
J'espère que vous serez entendus !
Bonne journée !

DoMi a dit…

@Roger. Petite précision : certains traducteurs sont salariés mais ils sont je crois plutôt rares…

DoMi a dit…

@Lise : rares sont les auteurs qui vivent de leurs écrits. La plupart ont un emploi salarié à côté…