La France s'est découvert une passion pour les anglicismes, censés être plus «cool», plus «fun». Dans cette histoire, les modernes ne sont pourtant pas où on le pense.
Il existe des rayons bio dans tous les hypermarchés, mais nous parlons une langue traitée à mort. Dans son livre «De quel amour blessée», le poète et essayiste Alain Borer institue la notion de «réchauffement linguistique»... C'est cela: nous cherchons à préserver notre eau, notre air, notre sol, nous voulons conserver notre modèle social, notre système de santé, le peu d'industrie qu'il nous reste, nous ravalons les façades d'immeubles, nous protégeons notre patrimoine, mais celui qui s'avise de défendre le français passe pour un barbon, un vieux ronchon hors course - et de droite, par-dessus le marché.
C'est automatique. Au mieux, il passe pour un poseur, un fayot, un intello. Et pourtant, le français, ce que nous avons de plus précieux, se porte mal. Sa maladie est interne, elle est externe - dans les deux cas volontaire, provoquée, et même revendiquée. Et c'est le plus tragique. L'Etat nous y invite le plus souvent, et c'est le plus absurde.
La suite de l'article de Jacques Drillon est à lire sur Bibliobs.
4 commentaires:
éh bien moi je trouve que beaucoup de "défenseurs" autoproclamés de la langue française sont bel et bien des réac ! J'adore le français, son orthographe, sa grammaire, ses règles tarabiscotées parfois absurdes, mais j'aime aussi savoir ma langue vivante, remuante, évolutive, je déteste qu'elle se sclérose et s'encroûte,j'aime les nouveau mots, les vieux qui reviennent à la mode, la mâtinage (oh horreur ! un néologisme !) avec d'autres langues, etc. Et j'aimerais qu'elle se simplifie pour arrêter d'être une langue élitiste, excluante et sélective. Mais en général on me répond que ça signifie que je n'aime pas ma langue... Ce qui confirme juste un certain manque de respect et de capacité de perception d'autrui.
Je suis d'accord : pour vivre une langue doit évoluer, et l'évolution passe souvent par le mélange. Mais la question est en fait plus vaste. Personnellement je trouve l'emprise étasunienne écrasante, trop agressive. Il suffit de regarder les couvs des magazines féminins (http://correcteurs.blog.lemonde.fr/2013/04/26/apprenons-a-lire-le-grazia/). On se demande dans quel sabir sont écrits les textes. Les campagnes promotionnelles de certains films se contentent de reprendre les appréciations des médias américains, après avoir vu déferler Halloween il y a quelques années (avec plus ou moins de succès, certes, mais ça va bien finir par prendre, c't'affaire-là, à force, à force), histoire de créer un événement commercial entre la rentrée des classes et les fêtes de fin d'année, on a cette année eu droit au Black Friday, le Huffington Post se contente souvent de traduire des articles ricains, Rue89 a un temps fait la même chose avec les articles d'une revue dont je n'ai pas retenu le nom, et ce ne sont que quelques exemples. On n'utilise plus de brillant à lèvres mais du gloss (d'alleurs on ne se maquille plus mais on emploie du make-up), les choses ne se font plus de façon draconienne mais drastique, les burger restaurants et bagel snacks fleurissent, les donuts remplacent de plus en plus les beignets, on relève de plus en plus de challenges et de moins en moins de défis, la plupart des blogueuses tricote des snoods et des shawls, on s'ébaubit devant les fictions américaines qui pour beaucoup ne relatent que violence(s) – tout en s'étonnant de la montée de celle-ci sous nos latitudes –, mensonges, trahisons et tout ça, à la longue, me gonfle (et je reste polie)… Et puis, tant qu'à adopter des mots dont on a déjà l'équivalent en français, pourquoi ne reprendre des mots que de l'anglais ?
L'an dernier les salariés de Carrefour avaient lancé une pétition de protestation contre l'anglicisation de l'enseigne, de la France et (allons-y !) de l'Europe :
http://www.petitions24.net/non_a_langlicisation_de_carrefour_de_la_france_et_de_leurope
et encore cette pétition ne mentionne-t-elle pas ce qu'on trouve/lit dans les rayons…
Il y a des évolutions qui sont inévitables, qu'elles soient lexicales, grammaticales... Les sens glissent depuis toujours, certains se perdent dans la glissade, ou s'enrichissent... D'autres nous arrivent d'autres langues et nous les adoptons et les adaptons.
Mais la limite à tout cela est le malentendu que les erreurs, les altérations engendrent : une langue peut et doit s'améliorer avec le temps pas devenir source de cacophonie autre que générationnelle ou (hélas) sociale. Si ce n'est pas le cas, elle sera remplacée. Et on sait que le français est déjà remplacé, jusque dans des conseils d'administration où, alors qu'ils étaient entre eux, on a vu de ses membres francophones parler entre eux en anglais.
Je milite pour qu'on emploie des mots au sens précis et qu'on recoure aux termes étrangers quand nous n'en avons pas de meilleur ou qui n'englobe pas toute l'acception que nous voulons atteindre, qu'on prenne garde à la syntaxe, histoire de ne pas se retrouver à dire le contraire qu'on a voulu dire ("Je crains qu'il ne vienne.") Et vive les néologismes !
Oui, je suis d'accord…
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